FRANCE: Renforcement de la lutte contre le blanchiment (LCB-FT) dans le marché de l'art (26 Nov 2020)
La nouvelle ordonnance n°2020-1342 du 4 novembre 2020 relative au renforcement de l’application des mesures de gel des avoirs et d’interdiction de mise à disposition est prise dans la perspective de son évaluation par le Groupe d’action financière (GAFI) du deuxième semestre 2020 à l’automne 2021.
Un renforcement du dispositif pour un secteur très exposé à la LCB-FT
Les conflits qui se déroulent en Libye et dans la zone du Proche et du Moyen-Orient (Syrie, Iraq, Yémen) ont mis en avant la problématique de la destruction du patrimoine culturel de ces pays et le risque de trafic illicite de ces biens spécifiques, en lien avec le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCBFT).
Les destructions de biens culturels opérées par certains groupes terroristes ont conduit à une réaction de la communauté internationale. Ainsi, en 2015, l’ONU a voté deux résolutions (résolutions 2199 du 12 février 2015 et 2253 du 17 décembre 2015) qui édictaient des sanctions visant à combattre le trafic illicite d’antiquités et de biens culturels en provenance d’Irak et de Syrie et à tarir les sources de financement de Daesh, parmi lesquelles le trafic d’antiquités pillées sur les sites archéologiques des zones occupées par cette organisation terroriste. La conférence de lutte contre le financement de Daesh et d’Al-Qaïda qui a réuni, à Paris les 25 et 26 avril 2018, 70 États et près de 20 organisations internationales, régionales et agences spécialisées, a réitéré cette nécessité.
Au niveau national, le ministère des Finances a lancé, dès novembre 2015, un appel à vigilance s’inscrivant dans le cadre du dispositif européen de lutte contre Daesh (R(CE) n° 1210/2003 et R(UE) n° 36/2012) à l’attention des professionnels du secteur afin de leur rappeler leurs obligations de vigilance face au commerce d’oeuvres d’art pillées par Daesh et dont l’origine pourrait être maquillée.
L’Union européenne travaille également à l’instauration d’un règlement visant à lutter contre les importations illégales de biens culturels afin de favoriser la création d’un cadre européen à la fois harmonisé et directement applicable.
Par ailleurs, le marché mondial de l’art montre un véritable dynamisme, évalué en 2019, pour les ventes aux enchères publiques, à 26 milliards d’euros pour le seul secteur « Art et objets de collection ». La France occupe la 4ᵉ place de ce marché, avec un produit de ventes aux enchères dans le même secteur de 1,88 milliard d’euros, sur un montant total adjugé en 2019 de 3,37 milliards d’euros.
Des flux financiers d’une telle importance, qui n’intègrent pourtant même pas les chiffres du marché des antiquaires et galeries d’art, entraînent naturellement des risques élevés de trafic d’objets d’art et de blanchiment de capitaux extrêmement difficiles à appréhender.
Le secteur de l’art est en effet particulièrement exposé aux risques LCB-FT dans la mesure où sa prestation peut être utilisée comme un mode de blanchiment en raison de certaines vulnérabilités, notamment :
- une fréquence importante des paiements en espèces ;
- une volatilité et une subjectivité des prix de vente ;
- le développement des ventes à distance ;
- l’utilisation des ports francs ;
Les marchands d’art et d’antiquités assujettis dés 2001, par l’article 33 de la loi n° 2001-420 du 16 mai 2001, codifié à l’article L. 561-2-10° du code monétaire et financier, sont soumis aux obligations de lutte anti-blanchiment et de financement du terrorisme (LCB-FT) dans le cadre de leur activité professionnelle
Les professionnels du secteur sont donc pleinement intégrés dans le dispositif LCB-FT au même titre que plusieurs autres entités ou professions non financières tels que les notaires, les jeux d’argent et de hasard, les experts-comptables ou les opérateurs de vente volontaires de meubles aux enchères publiques.
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